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)î(UNE SI LONGUE LETTRE )î(
11 mai 2020

Mariama BA : Une Si Longue Lettre 08

MB-USLL-0 - (8)

A Abibatou Niang, femme de vertu et de rigueur qui partage mes émotions.

A Annette d’ Erneville, femme de tête et de cœur,

A toutes les femmes et aux hommes de bonne volonté

 Mariama Ba : Une Si Longue Lettre 8

Puis, ce fut ton mariage avec Mawdo Ba, fraîchement sorti de l’Ecole Africaine de Médecine et de Pharmacie. Un mariage controversé. J’entends encore les rumeurs coléreuses de la ville :

-       Quoi, un toucouleur qui convole avec une bijoutière ? jamais, il « n’amassera argent ».

-       La mère de Mawdo Ba est une Diouféne, Guélewar du Sine. Quel soufflet pour elle, devant ses anciennes coépouses ! (le père de Mawdo était mort).

-       A vouloir coûte que coûte épouser une « courte robe », voila sur quoi l’on tombe.

-       L’école transforme nos filles en diablesse, qui détournent les hommes du droit chemin.

Et j’en passe. Mais Mawdo fut ferme.

Il souligna son adhésion totale au choix de sa vie, en rendant visite à ton père, non pas à son domicile, mais à son lieu de travail. Il revenait de ses randonnées, comme illuminé, heureux d’avoir « tranché dans le bons sens »exultait-il.

Il parlait de ton père, «créateur ». Il admirait cet homme affaibli par les doses quotidiennes d'oxyde de carbone avalé depuis le temps qu’il évolue dans l’âcreté des fumées poussiéreuses. L’or est sa chose qu’il fond, coule, tord, aplatit, affine, cisèle. « Il faut le voir, ajoutait Mawdo. Il faut le voir souffler la flamme. »

Ses joues  se gonflaient de la vie de ses poumons. Cette vie animait la flamme, tantôt rouge, tantôt  bleue, qui s’élevait ou se courbait, faiblissait ou s’intensifiait selon sa volonté et le besoin de l’œuvre.

Et les paillettes d’or sans les gerbes d’étincelles rouges et le chant rude des apprentis qui scandaient les coups de marteau chez les uns, et la pression des mains sur les soufflets chez les autres, faisant se retourner les passants.

Ton père Aissatou, connaissait l’ensemble des rites qui protègent le travail de l’or, métal des djinn-esprits invisibles-. Chaque métier a son code que seuls des initiés possèdent et que l’on se confie de père en fils. Tes grands-frères, dés leur sortie de la case des circoncis, ont pénétré cet univers particulier qui fournit le mil nourricier de la concession. Mais tes jeunes frères ?  Leurs pas ont été dirigés vers l’école des Blancs.

L’ascension est laborieuse, sur le rude versant du savoir, à l’école des Blancs :

-       Le jardin d’enfants reste un luxe que seuls les nantis offrent à leurs petits. pourtant, il est nécessaire lui qui aiguise et analyse l’attention et les sens du bambin.

-       L’école primaire, si elle prolifère, son accès n’en demeure pas moins difficile. Elle laisse à la rue un nombre impressionnant d’enfants ? faute de places.

-       Entré au lycée ne sauve pas l’élève aux prises à cet âge avec l’affermissement de sa personnalité, l’éclatement de sa puberté et la découverte des traquenards qui ont noms : drogue, vagabondage, sensualité.

-       L’université aussi a ses rejets exorbitants et désespérés

Que feront ceux  qui ne réussissent pas ?

L’apprentissage du métier traditionnel apparait dégradant à celui qui a un mince savoir livresque. On rêve d’être commis. On honnit la truelle.

La cohorte des sans métiers grossit les rangs des délinquants.

Fallait-il nous réjouir de la désertion des forges, ateliers, cordonneries ?

Fallait-il nous en réjouir sans ombrage ?

Ne commencions nous pas à assister à la disparition d’ une élite de travailleurs manuels traditionnels ?

Eternelles les interrogations de nos éternels débats. Nous étions tous d’ accord qu’il fallait bien des craquements pour asseoir la modernité dans les traditions .

Ecartelés entre le passé et le présent, nous déplorions « les suintements « qui ne manqueraient pas…

Nous dénombrions les pertes possibles. Mais nous sentions que plus rien ne serait comme avant. nous étions pleins de nostalgie, mais résolument progressives .

 

Offert Par Safiétou GUEYE ,

)i(une chenille devenue un papillon grâce à ce livre)i(

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  • Un roman épistolaire où Ramatoulaye Fall raconte à Aissatou, son amie de longue date, son veuvage et sa vie de femme, de mère. Ce roman célèbre aborde le statut des femmes au Sénégal et plus largement en Afrique de l’Ouest.
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